La légende raconte qu’en France un artisan arpente les routes pour offrir un peu de magie à sa clientèle…
Jour #8764
Aujourd’hui, alors que j’arpentais les terres enchantées de la Bretagne, une jeune femme m’attendait sur le bord de la route.
On lui avait raconté qu’un artisan peu banal passait une fois par an dans les parages et qu’il fallait absolument qu’elle me rencontre, c’est drôle, je ne pensais pas être un si curieux personnage.
Elle s’appelait Maewenn, elle avait l’air bien triste Maewenn, tellement que je lui ai offert une tasse de thé pendant qu’elle faisait le tour de mes marchandises.
Elle m’expliqua sa lassitude du quotidien : elle qui avait fait de longues études et croyait avoir décroché le job de ses rêves se retrouvait dans une routine où elle n’était finalement pas plus libre qu’auparavant, au contraire, elle était dans une prison dorée, prisonnière de ses factures et de la sécurité instable de son emploi.
Oh oui, elle était triste Maewenn, alors je lui avais promis de la surprendre.
Elle m’avait répondu que plus rien ne pouvait surprendre personne aujourd’hui, elle ne savait pas encore à qui elle avait affaire la petite ; tant mieux, la surprise serait donc de taille.
Je lui fis remarquer que si je n’avais pas la capacité de surprendre, on ne lui aurait sans doute pas conseiller de m’attendre ici.
Elle avait souri, un peu tristement mais c’était un début.
Je lui demandais alors ce à quoi ressemblerait, selon elle, un bijou breton.
Comme je m’y attendais, elle me décrivit dans un premier temps un bracelet avec le triskel représenté en plusieurs occasions puis un collier alternant perle bleue et perle blanche.
« Est-ce là tout ce à quoi tu penses qu’on peut résumer la Bretagne entière ? » lui avais-je alors demandé.
Elle ne sembla pas comprendre ma question alors je l’interrogeai sur la possibilité d’ouvrir une fenêtre sur sa région à travers un bijou, comme un objet magique qui pourrait lui montrer n’importe quelle partie de la Bretagne et lui en transmettre, avec une relative intensité, le caractère et la beauté.
Cette fois-ci elle avait ri, d’un rire presque moqueur, comme lorsque, enfant, on pointait du doigt celui qui croyait encore au Père Noël.
« Vous ne me croyez pas capable de cela, soit, alors comment décririez-vous, autrement, ceci ? »
Je lui présentais un bracelet d’or, gravé de nombreux paysages, recouvert d’un émail coloré.
« D’aucuns dirait qu’il s’agit là d’un simple bracelet mais savez-vous pourquoi j’ai choisi ces matières et représenté ces paysages, précisément ? » lui demandais-je.
« Parce que l’or ça fait chic ? Et parce que vous vouliez montrer que vous avez beaucoup voyagé en dans le coin. » m’avait-elle répondu.
« Non, je ne cherche ni à faire du chic, ni à prouver que je suis allé çà et là. Regardez bien les détails de ce bracelet…
Il est en or, parce qu’en plus d’être une matière connue, l’or est résistant ; si un jour nous devions tous vivre sous l’eau, nous pourrions bâtir des maisons en or qui survivraient aisément à la puissance de la marée bretonne par exemple.
Et en parlant de la marée, regardez donc ce bracelet et ses décors : vous y trouvez tantôt ces marées calmes caressant les plages sans fin, tantôt la violence des tempêtes qui s’abattent aussi bien sur les falaises abruptes qu’elles creusent toujours plus que sur les villes et villages du bord de mer.
Le Finistère… là où la Terre finit et où la mer commence.
Une Terre qui, par ailleurs, abrite nombres de grandes étendues verdoyantes, de forêts légendaires, de villages typiques.
La Bretagne c’est tout cela et ce bracelet est bien une fenêtre sur tout cela, ne croyez-vous pas. »
Elle était restée muette, passant inlassablement ses doigts sur les divers motifs ornant le bracelet.
« Tous mes produits sont réalisés durant mes périples.
Lorsque je viens ici, j’aime enfermer les sensations, les paysages, les caractéristiques de la Bretagne, parfois oubliée, souvent simplement méconnue, dans mes créations.
Je veux mettre dans mes produits l’âme des régions que je traverse pour que chaque personne qui porte l’un de mes bracelets puisse voyager avec moi, à travers les couleurs, les motifs, les histoires qu’ils rapportent.
Et pour cela, je prends le temps de travailler la matière, je choisis scrupuleusement des couleurs qui transmettent au mieux les émotions que j’ai éprouvé face à chaque découverte que j’ai pu faire, des matières durables pour que ce voyage ne s’arrête jamais ou presque.
Je fais mon art.
Un art, pour faire rêver les autres et étonner encore un peu. »
Encore une fois elle souriait, cette fois avec la douceur et la quiétude qu’elle croyait avoir perdues pour toujours.
Elle était restée longtemps, Maewenn, on avait parlé de la région, de la France, du merveilleux et puis elle était repartie, pleine de rêves et d’une liberté retrouvée, non sans m’avoir demandé si je pouvais rester encore quelques jours mais j’avais des histoires normandes à raconter… et cela,
c’était justement une toute autre histoire.