[Chronique] Le morpho bleu de Jean-Louis Roujean

Envie de lire un thriller/polar/suspens ?
Découvrons ensemble le premier roman de Jean-Louis Roujean !

Avant-propos

Dans cette section du site, je vous livre une petite chronique au sujet d’une nouvelle, d’un roman, bref, d’une histoire qui se vend et du storytelling réalisé autour de cette histoire (l’histoire qui vend l’histoire).

A chaque fois la chronique est réalisée comme il suit :

  • La présentation officielle
  • Ma réaction à la présentation
  • Qu’en penser après la lecture ?
    • sur la forme
    • sur le fond
  • J’aime… un peu, beaucoup, passionnément, à la folie, pas du tout ?
  • Remerciements et autres infos utiles.

Le morpho bleu : la présentation officielle.

Avril 2031. Quand le corps nu et congelé de Michelle Coltrane est découvert au petit matin à Springfield dans l’État de l’Illinois, l’inspecteur Azor Streyes est bien loin de se douter qu’il a mis le doigt dans un engrenage infernal. Finalement, six corps nus congelés de jeunes femmes vont jalonner la mythique route 66, de Chicago à Los Angeles. Leur point commun ? Un papillon morpho bleu tatoué dans leur cou.
Azor Streyes sera amené à enquêter à travers les Etats-Unis, entraînant le lecteur dans ses découvertes. Un puzzle complexe sur fond d’amours sulfureuses, d’amitiés complexes et de complots familiaux. Des enjeux financiers, artistiques, politiques et scientifiques sont au cœur de cette énigme singulière qui aborde les premiers effets du réchauffement climatique.
Lorsque la mer aura largement grignoté nos côtes et que l’espace habitable sera considérablement réduit, à quoi ressemblera le monde de demain ?
Un début de réponse à vous glacer le sang… même en Floride !

Catégorisation : Thriller, Polar, Suspens.

Ma réaction à la présentation.

Lorsque je lis cette présentation, je réagis comme à une bande annonce de film : ça passe ou ça casse.

Soit ce que je suis en train de lire est un excellent teaser, soit la bande annonce est en train de me spoil (pardon, « divulgâcher »), l’histoire complète…

Mais dans le doute, le décor est bien planté et pose déjà de très nombreuses questions auxquelles les adeptes de thrillers voudront forcément répondre par la lecture.

Le morpho bleu : qu’en penser après la lecture ?

ACHETEZ-LE, LISEZ-LE, RECOMMANDEZ-LE, OFFREZ-LE… bon vous avez compris je crois.

C’est un cri du cœur qui a une raison très simple : vous trouverez difficilement un roman qui allie aussi bien une forme hyper inclusive et un fond qui vous intrigue autant.

La dernière fois que j’ai eu cette sensation, c’était en découvrant « Au bout de la nuit » de Bruno Bouzounie et depuis si j’ai croisé de bon polars, j’ai trouvé peu de bons thrillers.

Discutons, donc, des ingrédients de qualité pour cette recette de suspens efficient.

Une forme accessible qui permet une bonne immersion

Pour bien situer la question de l’accessibilité et à titre de comparatif avec d’autres chroniques, c’est le bon moment pour indiquer que Jean-Louis Roujean est… chercheur au CNRS.

Pourquoi je le précise ?
Parce que toutes les 3 chroniques en moyenne, on me propose un livre par une personne qui a fait de longues études (pas nécessairement dans un domaine scientifique d’ailleurs) et dans 80% des cas, cela aboutit à une forme de classisme -souvent involontaire- par l’emploi de tournures ou de vocabulaire connue seulement d’une poignée très éduquée.

Et dans le morpho bleu, ça n’est pas du tout le cas.

Alors évidemment, il y a du vocabulaire scientifique, parce qu’il y a les dialogues avec les légistes qui en imposent et une fois de temps en temps, il peut y avoir un mot qui vous est inconnu MAIS pas au point de vous faire prendre le dictionnaire, de vous faire décrocher de l’histoire ou d’avoir la sensation qu’il vous faudrait préparer un doctorat en lettres modernes pour lire cet ouvrage.

Ajoutons à cela des phrases d’une longueur bien choisie, une mise en page aérée qui rend la lecture possible même aux yeux qui ont tendance à sauter des mots ou des lignes et on tient un roman qui peut réellement se lire.

La cerise sur le gâteau (ou plutôt le morpho bleu dans le cou), c’est la qualité de la narration descriptive.
C’est un exercice toujours très périlleux, en tout cas quand on veut présenter des personnages en profondeur, sans trop en faire.
Et là c’est rondement mené.

Vous saurez tout.
Vous saurez ce à quoi ressemblent les personnages, ce qu’ils aiment, ce qui les angoisse et vous le saurez naturellement, comme si vous étiez dans la peau du personnage principal et que vous serriez vous-même les mains, meniez vous-même les interrogatoires.

Il n’y a pas un mot de trop dans ce roman et ça, c’est déjà un point extrêmement fort.

Maintenant on va s’attaquer à la partie qui pêche souvent quand on parle de thriller : le fond.

Un thriller qui revient aux origines du genre.

A chaque fois que je dois chroniquer un thriller, j’ai peur.
Bon, au moins c’est raccord avec le genre, vous me direz, là où ça l’est moins, c’est quand un roman s’invente thriller alors qu’il n’est « que » policier.

Attention, il n’y a aucun mal à écrire du simple polar, il en existe d’excellents, le souci c’est quand vous annoncez à tort un thriller, là on est en plein dans le danger du storytelling : si vous offrez une attente que vous ne comblez pas, les gens n’y reviendront pas.

Bonne nouvelle ici, c’est un vrai thriller.

Et il ne se contente pas de vous tenir en haleine à coup de « cliffhanger » en fin de chapitre, que nenni, il se paie le luxe de vous offrir une intrigue qui s’épaissit à chaque nouvel indice découvert; chaque fois que vous croyez avoir vu venir la conclusion, chaque fois qu’un élément vous a semblé faire sens, vous allez devoir tout repenser, exactement comme le héros.

Et plus vous allez progresser dans l’histoire, plus une forme d’angoisse va s’installer parce que le jeu de vocabulaire amène d’autres questions, notamment quant au réalisme possible de l’histoire (bon, il n’est pas catégorisé sci-fi mais si vous le lisez, venez nous dire en commentaire si vous ne trouvez pas qu’il s’inscrirait aussi bien dans cette catégorie).

J’aime… un peu, beaucoup, passionnément, à la folie, pas du tout ?

Au cas où ça vous aurait échappé au milieu de ce que j’ai dit, j’ai absolument adoré.
Et je pense qu’on peut résumer le motif comme ceci : ce livre est l’œuvre d’un chercheur qui a su mettre son expérience et son imaginaire au service d’un récit qu’il a, dans le même temps, su préserver de toute forme de lourdeur.

Et c’est d’autant plus bluffant que c’est un premier roman; on ne parle pas de quelqu’un qui a tâtonné avec 3, 4, 5 tomes préalables pour trouver un équilibre entre l’histoire à délivrer et le style compatible avec un lectorat large; on a un premier essai transformé qui en dit très très long sur le travail qui a du être effectué en amont.

Un travail qui se ressent d’ailleurs jusque dans un détail que j’ai vraiment apprécié : il n’y a aucune facilité.
Et si je le souligne de nouveau, cette fois je vais faire preuve de plus de précision : à aucun moment je n’ai ressenti un recours à un cliché.

On a un enquêteur humain, faillible, aux pensées vagabondes, parfois torturées, loin de l’image trop parfaite qu’on peut trouver ailleurs.
On a de vrais problèmes d’éthique qui ne viennent pas avec un gros panneau annonciateur et qui sont traités pour ce qu’ils sont, avec un héros qui ne se sert pas de sa position pour enfreindre la logique à grand renfort de « mieux vaut demander pardon que la permission ».
Et surtout… aucun personnage n’a une particularité dans le seul but de servir l’intrigue.

Sur ce point je vais développer un instant.
Il existe, très malheureusement, un florilège de livres dont les personnages (même secondaires) sont issus de minorités (origines, orientations sexuelles, divergences neuro ou pas) parce que ça servirait l’intrigue.

Récemment, une autrice revenait sur la question de la représentation et le recours inappropriés aux personnages autistes dans les fictions mais cette question s’applique à toutes les minorités.
Et il me semble important de souligner que dans ce roman, il y a plusieurs minorités représentées mais à aucun moment elles ne le sont pour autre chose qu’un peu de diversité et ça fait du bien !

Remerciements et autres infos utiles.

Je ne peux que remercier chaleureusement Jean-Louis Roujean pour la confiance accordée en me proposant de lire et chroniquer son livre qui a vraiment comblé l’ensemble de mes attentes.

Outre le fait qu’il place la barre très haut pour les prochains thrillers que je lirai, il est l’occasion de réaffirmer qu’on peut écrire un roman qualitatif ET accessible, SANS cliché; c’est une bouffée d’air dans la littérature et j’espère avoir le plaisir de voir de nouveaux écrits naître sous la même plume !

Où retrouver « Le morpho bleu » ?

Vous pouvez vous procurer l’ebook ici pour 2.99 € ou, si vous aimez tâter du papier, opter pour la version Broché 🙂
Il s’agit d’un lien affilié, votre achat par le biais de ce lien contribue à faire vivre mon activité de chronique 🙂

Quid du storytelling, finalement ?

On est exactement dans un cas de storytelling parfaitement maîtrisé.

La présentation ferait une très bonne bande annonce de cinéma parce que le roman se déguste comme un excellent film.

On nous promet une intrigue complexe, qui touche à toutes les sphères (privées, publiques, professionnelles) et à tous les domaines (finances, familles, amours et même climat !), tout en nous disant que ça nous glacera le sang… est c’est un tableau plein !

S’il était adapté en film demain, il serait de ceux qu’on va voir plusieurs fois parce qu’il n’y a rien en trop et il pourrait vous vendre n’importe quoi les yeux fermés (à commencer par un séjour en Floride).

Si vous cherchez un bon exemple de storytelling efficace, vous tenez une excellente étude de cas à travers cette lecture qui respecte les 3 actions à accomplir pour un storytelling efficient.

Laisser un commentaire